jeudi 30 décembre 2010

Examens anatomiques des Noirs et des pédés

J'ai enfin vu La Vénus noire, film d'Abdellatif Kechiche (son précédent succès: La Graine et le mulet) qui nous fait entrer dans la peau de Sarrtjie Baartman, une Sud-africaine d'origine hottentote exhibée dans les foires européennes et les parties fines parisiennes au 19ème siècle. Soumise aussi à l'examen de chaque partie de son anatomie -- c'est historique -- par des hommes de science décidés à prouver l'infériorité de la race noire. Le fait est connu, mais de le voir représenté en très longues séquences nous fait prendre conscience des progrès accomplis depuis dans l'acceptation et le respect de la différence.

Considération croissante d'une moitié de la population mondiale envers l'autre -- celle qui porte la génération suivante, la met au monde, la nourrit; respect des nations techniquement développées envers les peuples qui ont suivi un mode de vie différent -- du moins, on leur fout la paix s'ils vivent sur des sols pauvres en ressources... Cette évolution, très récente, n'est de loin pas aboutie. Je me souviens des Africains que le cirque Knie exhibait dans sa ménagerie -- j'avais alors une dizaine d'années -- et, une autre fois, des Lilliputiens originaires de Hongrie qui mesuraient environ 80 cm à l'âge adulte et devaient peser entre dix et quinze kilos.

Quant à la Race d'Ep [terme verlan pour pédéraste popularisé par le livre de Guy Hocquenghem (1979) et le film documentaire de Lionel Soukaz] comment a-t-elle évolué? Les premiers articles et livres que j'ai lus en cachette sur le sujet décrivaient les particularités physiques et mentales de ces êtres déviants dont j'étais: arrière-train plus développé que chez le mâle normal, anus dilaté, thorax peu développé, voix efféminée, attitude maniérée, comportement sexuel satyriasique incitant à la prostitution et à la criminalité. La dépénalisation des relations homosexuelles date de 1942 en Suisse, alors qu'en Allemagne les gars épinglés du triangle rose attendaient la mort dans les camps. La RDA a décriminalisé en 1968, la RFA en 69, la France en 82. L'Association psychiatrique américaine a biffé l'homosexualité de sa liste des maladies mentales en 73, l'OMS en 92... On sait qu'en dehors de l'Occident qui rêve de mariage en blanc, tout ou presque reste à faire, à commencer par l'abolition de la peine de mort.

André

mardi 28 décembre 2010

Pasteurs et prêtres malfaiteurs mis à nu par la justice: le tabou est enfin brisé

Comme chaque dimanche, Joe a publié avant-hier dans son blogue Joe My God la liste des fraudes et délits commis par des personnes que le seigneur dieu a chargées de nous conduire sur le droit chemin. Du moins ce que Joe a pu relever ces sept derniers jours dans les médias.


Bangladesh: l'imam Ali Afsar arrêté en rapport avec la mort d'une femme qui avait été fouettée en public pour adultère.
Bolivie: le père José Ochua condamné à 22 ans de prison pour abus sexuel commis sur 19 pensionnaires d'un orphelinat, voire plus.
Irlande: l'archevêché de Dublin aurait déplacé plusieurs fois le père Tony Walsh pour couvrir ses nombreuses agressions sexuelles sur des filles et des garçons, sans jamais le dénoncer à la police. Une autre enquête irlandaise révèle que cinq prêtres auraient constitué un cercle d'abuseurs en mettant des chambres à disposition les uns des autres pour perpétrer leurs viols et en organisant des excursions en groupe avec leurs victimes.
Italie: la justice italienne maintient la saisie d'un montant équivalent à 31 millions de dollars déposés sur un compte de la banque du Vatican, en lien avec une affaire de blanchiment d'argent de la maffia, et en effraction avec la législation européenne.

Texas: le pasteur Earl Post, arrêté pour avoir approché une ado de trop près. La pasteure Sandra McGriff arrêtée pour le vol de deux manteaux de fourrure; trois sacs à main et un ordi ont été trouvés dans sa Jaguar. Le pasteur Ivory McDaniels accusé de plusieurs agressions sexuelles sur des mineures.
New York: le rabbin Victor Koltun plaide non coupable pour avoir commandité le meurtre de deux hommes; le rabbin est déjà condamné à cinq ans de prison pour fraude postale.
Iowa: le pasteur Timothy Parker condamné à 20 ans de réclusion pour viol d'un enfant.
Californie: le père Joseph McCabe ne sera pas libéré sous caution en attendant son extradition vers l'Irlande où il est accusé de plusieurs agressions sexuelles sur des enfants.
Connecticut: le pasteur David Pomales et ses enfants arrêtés au cours d'une bagarre à l'église.
Kansas: le pasteur Mark Holick arrêté pour distribution agressive d'évangiles à la sortie d'une mosquée.

N.B. Il ne s'agit pas ici d'attaquer la foi, mais ceux qui trahissent leur engagement public. Et de reconnaître que, bien tardivement, la justice intervient enfin.

André

samedi 25 décembre 2010

Un chant en souvenir des petits gars qui ne supportaient plus d'être harcelés

Dimanche dernier, la chanteuse de musique country LeAnn Rimes s'est jointe au Gay Men's Chorus de Los Angeles pour honorer la mémoire des jeunes adolescents et étudiants gay qui se sont donné la mort cette année aux États-Unis parce qu'ils ne supportaient plus le harcèlement dont ils étaient victimes à l'église, à l'école ou l'uni et parfois aussi à la maison. LeAnn n'a pas retenu son émotion en l'évoquant; elle a aussi dédié The Rose aux filles et aux garçons qui font face à la discrimination en leur disant: tenez bon!


Some say love it is a river / That drowns the tender reed.
Certains disent: l'amour c'est une rivière qui noie le tendre roseau.
Some say love it is a razor / That leaves your soul to bleed.
Certains disent: l'amour est un rasoir qui laisse votre âme en sang.
Some say love it is a hunger / An endless, aching need.
Certains disent: l'amour est une faim, un infini et douloureux besoin.
I say love it is a flower, / And you it’s only seed.
Je dis que l'amour est une fleur, et vous sa seule graine.
It’s the heart afraid of breaking / That never learns to dance
Le coeur qui a peur de se briser n'apprend jamais à danser
It’s the dream afraid of waking / That never takes the chance
Le rêve qui craint de se réveiller ne saisit jamais sa chance.
It’s the one who won’t be taken, / Who cannot seem to give
Celui qui ne veut se donner n'arrive pas à donner
And the soul afraid of dying / That never learns to live.
Et l'âme qui a peur de mourir n'apprend jamais à vivre.
And the night has been too lonely / And the road has been too long.
La nuit a été trop solitaire, la route trop longue.
And you think that love is only / For the lucky and the strong.
Vous pensez que l'amour n'appartient qu'aux chanceux et aux puissants.
Just remember in the winter / Far beneath the bitter snow
Mais souvenez-vous qu'en hiver, profondément sous la neige durcie
Lies the seed that with the sun’s love, In the spring, becomes a rose.
Sommeille la graine qui, grâce à l'amour du soleil. deviendra rose au printemps.

Paroles d'Amanda McBroom.

jeudi 23 décembre 2010

Le sexe c'est cool, sain et naturel -- les MST sont naturelles aussi, mais pas cool

Fonda, Hopper, Nicholson.
La nouvelle campagne de prévention de l'Aide suisse contre le sida (ASS) nous rappelle qu'à côté du VIH, qui demeure la préoccupation principale, d'autres maladies peuvent aussi être transmises au cours de rapports amoureux et sexuels. Il s'agit principalement de la syphilis, de la gonorrhée et de la chlamydiose. Elles sont actuellement en augmentation, spécialement chez les hommes gay. Et elles accroissent le risque d'être contaminé par le VIH, ou de le transmettre. D'autre part, leur évolution présente plus de danger pour les personnes séropositives. Or, saloperie des saloperies, ces MST ne manifestent aucun symptôme, la plupart du temps...

Pour communiquer son message, l'ASS a choisi Easy Rider, le motard qui fonce victorieusement vers l'horizon parce qu'il a déjoué les pièges de la contamination qui sont: le manque de précaution et la paresse, la peur ou l'inconscience face au test médical. En Suisse, 10% à 12% des mecs gay sont séropositifs. C'est à eux, premièrement, qu'il faut éviter de passer une autre MST. Et à tous les autres -- ceux qu'on aime, qu'on admire ou qu'on ne connaît pas encore; ceux qu'on ne connaîtra jamais, sauf "bibliquement" après avoir baisé dans un coin sombre. L'ASS résume: "Le sexe c'est cool, le sexe c'est sain, le sexe c'est naturel. Les maladies sexuellement transmissibles sont naturelles, mais ni cool, ni saines."
Pour que le sexe reste cool et sain.

Or, les méthodes de prévention qui nous protègent contre une contamination au VIH diminuent le risque de contracter une autre MST, mais de manière moins efficace que contre le VIH. Car elles sont plus facilement contagieuses que lui: elles peuvent se transmettre au cours d'une pipe -- même sans éjac -- ou par contact avec une zone infectée de la peau, au-delà de ce que recouvre la capote. Mais, pas de panique! La plupart des MST sont curables, à condition d'être diagnostiquées et traitées à temps. La campagne Easy Rider montre comment se protéger, diminuer les risques et éviter les conséquences d'une détection tardive. Cliquez sur www.gay-box.ch. Malgré cette déplorable manie alémanique de formuler les slogans suisses en anglais, les recommandations sont en français et personne ne donne des leçons de morale. Le sexe c'est sain, c'est naturel et, comme tout ce qu'entreprennent les humains, il présente aussi des défis...

André

mardi 21 décembre 2010

Le Père Noël des Blogueurs est une ordure

New York, Times Square.
Ce matin, en allumant l'ordinateur, j'ai découvert une enveloppe dans les bottes que j'avais posées hier sur le disque dur, avant de m'endormir. Le Père Noël des Blogueurs était passé.Dans l'enveloppe, au lieu du traditionnel bon de la Fnuck, j'espérais trouver une invitation à l'audience mensuelle du Saint-Père George WhatElse. Je l'aurais imploré de bénir mes Bijoux de Famille afin qu'ils demeurent opérationnels jusqu'à l'âge de cent ans... voire plus, selon Sa miséricorde. (Et lui aurais offert une bouteille de Fendant, pour qu'il puisse boire autre chose que ce jus de capsule.)

L'enveloppe contenait uniquement une lettre, celle que les patrons paresseux font rédiger par leur secrétaire au lieu de convoquer l'employé à la séance annuelle d'évaluation.

"Monsieur Depinge, en 2010 enfin vous avez réalisé les quotas qui vous étaient assignés. Cette nuit, nous avons relevé les statistiques des pages vues sur votre blogue durant les trente derniers jours. Vous arrivez à 16'147 pages alors que vous atteigniez à peine les 11'000 au début de l'automne. Vous tenez maintenant une moyenne entre 400 et 600 pages/jour qu'il vous faudra améliorer l'an prochain, sinon nous serons obligés de revoir votre statut. Vous devez gagner encore de vrais lecteurs auprès de vos objectifs cibles -- la France ( actuellement 9248), les États-unis (1340), le Canada (1176), la Suisse (1087), la Belgique (792) -- et pas seulement des branleurs en quête d'images. Pour soutenir votre effort, nous avons lancé une campagne mondiale de notoriété que, je n'en doute pas, vous saurez mériter. Je ne vous souhaite pas de bonnes fêtes ni de gros festins, cette période est pour notre industrie celle qui demande le plus de réactivité et de lucidité." Signé: Père Noël des Blogueurs.

André Photos avec la complicité de Photofunia.

lundi 20 décembre 2010

La guerre sans fin contre les soldats gay

Samedi, le Sénat américain a ouvert la voie à l'abolition de la loi de 1993 interdisant aux soldats américains d'afficher leur homosexualité. Avant le vote, le républicain John McCain avait souligné les «importants dégâts» sur l'efficacité des soldats au combat que cet décision provoquerait. Le démocrate Carl Levin avait rétorqué: «La première victime de la guerre en Irak était un homosexuel. La mine qui lui a arraché la jambe droite se moquait de savoir s'il était gay ou hétéro.» Une étude du Pentagone montre que les soldats sont prêts à accepter l'abrogation. [Même sans douches ni chiottes séparées. On le sait, leur construction alourdirait le budget militaire au point que les USA devraient renoncer à leurs prochaines guerres d'invasion.]

Jim Robinson, fondateur de la plateforme internet de droite Free Republic a immédiatement réagi. "Les homosexuels ont déjà les mêmes "droits" que tous les autres. Mais Dieu n'a pas accordé et la constitution ne garantit pas aux homosexuels des droits spéciaux. En réalité, le programme (agenda) homosexuel est rempli d'attaques frontales contre NOTRE propre droit à la liberté de parole, qui nous vient de Dieu et que la constitution protège, ainsi que contre notre liberté de religion, notre liberté d'association, la Vie, la Famille, le Mariage, la Poursuite du Bonheur, etc."

L'ancien aumônier militaire G. J. Klingenschmitt a manifesté sa colère. "Un aumônier de mes amis a demandé à Dieu: 'Pourquoi permets-tu l'accroissement du mal en Amérique et à l'homosexualité déclarée d'être imposée à nos soldats?' Ce à quoi le Seigneur a répondu par ce verset des Psaumes (92:8): 'Lorsque les malfaisants poussent comme l'herbe [...] c'est pour être détruits à jamais.' Le péché homosexuel sera toujours une puanteur aux narines du Dieu Tout-Puissant, une abomination qu'Il condamne et punira de la destruction éternelle." Klingenschmitt a immédiatement faxé un message à 125'000 pasteurs "patriotes" à travers l'Amérique pour mobiliser les fidèles à voter (en 2012) contre les sénateurs qui ont accepté l'abolition de DADT.

Lorsque ces bondieusards se mobiliseront contre la guerre, je pourrai enfin croire qu'ils possèdent la même bible que moi et... qu'ils la lisent.

André
Scène tirée du film Jarhead -- La fin de l'innocence, de Sam Mendes avec Jake Gillenhead (2005).

vendredi 17 décembre 2010

Vatican: des gogo boys pour papa Ratzi

Alors que les Zurichois se régalent en applaudissant Les Farfadais sous le chapiteau de Swiss Christmas, le Vatican a aussi invité des acrobates au pied du sapin. Mercredi, les Pellegrini Brothers ont exécuté leur vigoureux numéro d'élévation lors de l'audience générale hebdomadaire. Ils ont enchanté le pape et l'auditoire d'ecclésiastiques et de soeurs. Voyez la vidéo, elle vaut son pesant d'indulgences.

Ci-contre, à la gauche de papa Ratzi, on distingue clairement son secrétaire particulier le beau Georg Gänswein que les mauvaises langues du Vatican ont prénommé Gay-Org. N'allez pas croire que cet Allemand de 54 ans se conduit comme une tante. Athlétique, grand joueur de tennis devant l'Éternel, skieur et pilote d'avion, il a enseigné la loi ecclésiale à l'université ultra-conservatrice de l'Opus Dei à Rome. Pour le reste, son curriculum vitae a partiellement disparu, comme les dossiers concernant la pédophilie dans le diocèse de l'évêque allemand Joseph Ratzinger. G.G. loge dans l'appartement papal et on le trouve au côté de S.S. (Sa Sainteté) sur toutes les photos. Il ne le quitte pas d'une semelle de godillot Prada. Il paraît que G.G. supervise le bain de S.S., qu'il débarrasse ses habits le soir et l'aide à se vêtir le matin. Il est, comme qui dirait, l'Épouse mystique du pape. [Dans mon fantasme, je le vois plutôt dans le rôle de l'Époux et j'espère qu'il enfile un Préservatif mystique, maintenant que s'opère un léger revirement vaticanesque sur la capote.]

Quelles sont les raisons du choix des frères Pellegrini pour cette audience papale? D'abord, ils sont Italiens. Et, en 2008, ils ont remporté le Clown d'Or au 32e Festival international du cirque de Monte-Carlo, ce qui a ravi le Prince Albert [non! pas l'anneau, le prince régnant]. La même année, ils tenaient la vedette dans le grand spectacle du Cirque Gay à Barcelone. "Ecce homo!", "Voici l'homme!" disait Ponce Pilate à la foule mécréante en lui présentant Jésus que ses sbires venaient de fouetter et couronner d'épines. Che casino! [= Quel souk!]


André

mercredi 15 décembre 2010

Nus ou presque: ensemble pour l'acrobatie, les photos et la vie

Franco-italien qui a passé huit ans de son enfance dans la région de Zurich, Stéphane Haffner se retrouve en Suisse où sa troupe Les Farfadais est la vedette du spectacle Swiss Christmas qui se déroule sous chapiteau à Zurich-Oerlikon jusqu'à la fin de l'année.

Ce que j'admire chez Stéphane Haffner -- fondateur des Farfadais avec son frère Alexandre -- c'est sa capacité de nous éblouir sur scène, sous chapiteau, dans les magazines d'esthétique mâle et dans le quotidien. Avec son compagnon de vie Emiliano Simeoni, il forme le duo d'acrobatie Angels, aussi musclé que sensuel. Ensemble ou séparément, les deux hommes ont posé pour plusieurs photographes de mode et de nu, dont le zurichois Marco Carocari. le new-yorkais Thomas Synnamon et le parisien Jean Quelquejeu.

Enfant, Stéphane a commencé son entraînement de gym artistique à Oerlikon. Il avait 17 ans lorsqu'un accident a brisé son rêve de devenir un sportif de haut niveau.

Persévérant, il n'a pas abandonné la gymnastique tout en étudiant le stylisme de mode à Paris. Et pour se faire des sous, il a choisi le spectacle de rue. Succès étonnant qui lui a permis de financer ses études dans une école du cirque. Grâce à cette double formation, il a pu créer des numéros visuels très aboutis, tant au niveau des costumes que de l'acrobatie. Ce qui lui a valu des engagements à travers le monde.

C'est à Rome, lors d'une émission à la Rai-1 qu'il a rencontré Emiliano Simeoni, danseur de formation et mannequin. Ils ont été frappés, disent-ils, "d'un réel coup de foudre", ce qui les a amenés à travailler ensemble dans ce duo de danse-acrobatie où la technique aérienne du tissu tient une large part. Et c'est ainsi que le danseur s'est joint à la troupe des Farfadais. Les frères Haffner tiennent à préciser qu'en plus de la collaboration professionnelle, les trois hommes sont unis par "un lien sentimental très fort de grande amitié". Magnifique engagement professionnel et privé!

André

lundi 13 décembre 2010

Des centaines de milliers d'ados LGBT jetés à la rue aux États-Unis

Samedi, Carl Siciliano, le fondateur et directeur de deux lieux d'accueil pour les jeunes LGBT sans-abri à New York lançait un appel pressant dans les médias gay. Les autorités de la métropole américaine ont réduit de moitié le soutien financier qu'elles accordaient à ses institutions. À New York, écrit Siciliano, "3'800 jeunes dorment dans les rues chaque nuit. Plus de mille d'entre eux déclarent qu'ils sont LGBT. Or, dans notre ville, on ne compte que 250 lits pour tous les ados sans-logis... Des jeunes gay et lesbiennes nous arrivent de tous les coins du pays; ils viennent nous demander de la nourriture, une douche, des services médicaux, de l'aide psychologique et les autres formes de soutien que nous proposons. Nos responsables font tout leur possible afin de les aider et leur trouver un lit, mais il y a si peu de possibilités que nous en sommes réduits à leur donner des conseils: comment survivre et se protéger en allant dormir dans le métro, les parcs, les bâtiments abandonnés, les chantiers. Jusqu'à ce que nous leur trouvions une meilleure solution."

"Hier, un de nos collaborateurs a passé l'après-midi à chercher un logis pour une jeune fille qui venait d'arriver à New York. À la fin, il a été obligé de lui recommander de passer la nuit dans la rue. Elle en pleurait... Ce qui arrive à ces gosses est terrible! Dans tout le pays, cela fait des centaines de milliers de jeunes vulnérables qui sont chassés de la maison à cause de leur homosexualité, privés de tout soutien familial et forcés de se débrouiller sans aucun moyen pour survivre. Je suis scandalisé par la violence et les humiliations qu'ils subissent dans la rue, la façon dont ils sont harcelés par les autres jeunes dans les lieux d'accueil non spécialisés, et que la prostitution soit pour beaucoup le seul moyen de survivre. J'en crève de voir des jeunes subir autant de traumatismes profonds."

On estime à 1,6 million le nombre des jeunes jetés à la rue aux États-Unis; entre 30% et 40% d'entre eux se déclarent homos. Environ 26% des ados américains homos sont chassés de chez eux lors de leur coming out. Parents inconscients ou violents, familles d'accueil et parents abuseurs, milieux évangéliques ou catholiques. D'autres enfants fuguent pour échapper aux "thérapies réparatives" religieuses auxquelles on veut les contraindre.

Carl Siciliano: deux refuges pour jeunes LGBT sans-logis.
Carl Siciliano poursuit: "Ces ados jetés à la rue par des parents qui ne veulent pas les accepter tels qu'ils sont, c'est l'aspect le plus odieux de l'homophobie actuelle. C'est aussi la pire marque de mépris envers la communauté gay. Alors, je ne comprends pas pourquoi la protection de ces jeunes laissés à eux-mêmes ne figure pas au premier plan des priorités du mouvement LGBT. Expliquez-moi aussi pourquoi les organisations de défense des gay ne se battent pas afin d'obliger les autorités à protéger ces enfants abandonnés; à quoi servent nos impôts? Cette situation est un cauchemar."

André

vendredi 10 décembre 2010

Avec ce gars, c'était Noël toute l'année

Mon plus ancien souvenir de Noël: le sapin touchait au plafond et j'étais tout petit. Sa seule décoration: des bougies blanches; pas de crèche à son pied, juste quelques cadeaux. En grandissant, j'ai découvert que d'autres familles chargeaient leur arbre de boules, guirlandes et bougies multicolores, comme dans les magasins, et le dressait au milieu du salon. Le nôtre ne se trouvait pas dans l'appartement, mais dans l'atelier de peinture de notre mère, là même ou j'écris ce texte. Je vois diverses raisons aux Noëls déstructurés de notre enfance. Question de foi chrétienne: il ne fallait pas mêler la tradition nordique de la fête de la lumière à la naissance du Sauveur. Ensuite, peut-être qu'on plaçait le sapin à distance par déférence envers notre père, qui avait perdu une fille et un fils -- leur mère les avait gazés en se suicidant. Les fêtes de famille devaient être particulièrement pénibles pour lui. Nous, les enfants du second lit, nous l'ignorions.

Après un premier homme-passion que j'ai quitté parce que je ne voulais pas le partager avec sa seconde épouse (décidément...), j'ai rencontré Noël (son deuxième prénom, parce qu'il était né cette nuit-là) et me suis embarqué dans une histoire passionnelle avec lui. Il ressemblait au jeune homme ci-contre, en plus futé et avait 21 ans, moi 34. D'un intellect brillant et d'un caractère pas facile -- alors que j'étais plus arrangeant, intuitif et brouillon (ce qu'il faut pour faire un journaliste passable) -- Noël préparait sa thèse tout en passant une deuxième licence et en exerçant le métier d'assistant à l'uni. Notre histoire a duré deux fois sept ans. Sept ans de partage à tous les étages, puis sept ans de fraternité lorsqu'il m'a quitté pour vivre avec Nurettin, un gars de son âge. Les éléments les plus étranges, dans cette histoire, c'est que: 1) les deux mecs ont trouvé un appartement à quatre minutes de chez moi, 2) la relation entre Noël et moi s'est poursuivie, sur le plan fraternel, et qu'à cette fraternité s'est joint le nouvel arrivé, Nurettin, 3) que ces deux-là qui composaient ma famille de coeur sont morts à moins de 24 heures de distance l'un de l'autre -- Noël passé à tabac de façon si violente qu'il a trépassé deux jours plus tard, et Nurettin terrassé par le sida. J'étais près d'eux pour recueillir leur dernier souffle. C'était en 1985.

C'est ainsi qu'un fils -- moi -- a rejoint le sort de son père, même si son destin d'homme gay semblait lui promettre un avenir opposé.

André

mercredi 8 décembre 2010

Un amour qui aurait pu naître au bord de la plage

"Les Noces" de Stravinsky, chorégraphie de Pascal Rioult.
"It's a losing proposition to wait around hoping for a dream lover to show up in our lives," écrivait le devin Rob Brezsny le 3 novembre dernier. "Il est illusoire d'attendre que l'amour idéal débarque un jour dans nos vies, car personne, jamais, ne peut correspondre à l'image idéalisée que nous véhiculons dans notre imagination. Cela dit, Taureaux, j'ai le plaisir de vous informer que les deux mois à venir se présentent favorablement pour la rencontre d'une beauté imparfaite et bénéfique." Quinze jours plus tard, je me trouvais à la Grande Canarie dans un café internet, échangeant des coups d'oeil complices avec un autre claviste à cause d'un incident rigolo qui se déroulait dans le local.

Complicité sans suite et vite oubliée... Sauf que, le lendemain, en arrivant sur la plage où quelques centaines de mecs étaient déjà installés, sans m'en rendre compte j'ai posé sac, bouquin et serviette de bain à ses pieds. Il m'a interpellé, nous avons évoqué l'incident de la veille, puis je suis allé nager. Plus tard, me demandant où avait disparu ma pomme, je me suis aperçu qu'elle était sur son ventre. Il l'a rapportée, nous l'avons partagée et il ne m'a plus quitté. Nous avons échangé nos curriculums en les soulignant de gestes de plus en plus caressants. Lui, Dirk, Néerlandais, beau jeune homme dans la soixantaine, terriblement attachant par son humour et sa virilité sans apprêt. Il paraissait aussi séduit que moi et l'exprimait clairement par la parole et le geste.

Sous le qualificatif de beauté imparfaite, je m'attendais à quelqu'un de moche ou de difficile. Dirk est un amour idéal qui a duré une heure merveilleuse. Veuf de son compagnon, il avait rencontré récemment un Italien avec lequel il espérait établir une relation durable. Dommage, a-t-il dit, parce que je pourrais t'aimer. Moi, pareil. Mais Dirk rentrait aux Pays-Bas le lendemain... Pendant une heure, je me suis senti désirant et désiré comme je l'étais à 25 ans et que je me foutais bien des gens qui pouvaient nous voir échanger des caresses et des baisers.

Puis nous sommes redevenus des adultes, heureux de ce cadeau. Nous nous sommes dit adieu, au lieu de voler quelques heures à la nuit qui auraient terni l'éclat de l'instant. Et je suis heureux d'avoir pu tester ma capacité à fondre encore, avec un homme parfait rencontré à un moment imparfait. Dans ses Lettres à Lucilius, Sénèque qui rédigeait les discours de l'empereur Néron, écrit au sujet de la vieillesse: "Elle est pleine de douceurs pour qui sait en user. Les fruits ont plus de saveur lorsqu'ils commencent à se flétrir; l’enfance n’a tout son éclat qu’au moment où elle finit; pour les buveurs, la dernière rasade est la bonne, c’est le coup de l'étrier qui rend l’ivresse parfaite. Ce qu’a de plus piquant toute volupté, elle le garde pour l’instant final. Le grand charme de la vie est à son déclin, je ne dis pas au bord de la tombe, bien que, même sur l’extrême limite, elle ait à mon gré ses plaisirs."

André

dimanche 5 décembre 2010

La sensualité animale et machiste du torero

Dans son blogue The Sartorialist le photographe Scott Schuman capte les élégantes, les dandys et quelques personnages plus originaux dans la rue, pour faire connaître la mode qui se porte, plutôt que celle qu'on essaie de nous imposer. Mais j'ai l'impression qu'étant donné son immense succès, il glisse de plus en plus de rendez-vous arrangés au milieu de ses rencontres "spontanées" dans les beaux quartiers de Milan, Paris, Londres ou New York. Les magazines de mode, ces pollutions de l'honnête frivolité féminine ou masculine, ont recours à ses services -- et l'on sait que tout ce qui passe dans leurs pages est triplement financé: 1) par les lectrices, 2) par la pub générale, 3) par les fringues et les autres produits présentés. [Imaginez une ouvrière sexuelle qui serait rémunérée par son client, par la ville dont elle use le trottoir, et par son mac: c'est ça, l'industrie de la mode!]

Lundi dernier, sous le titre "The Matador, Madrid, Spain" (à matador, de matar tuer, les Espagnols préfèrent torero, c'est plus sport) The Sartorialist [cliquez] a présenté ces beaux mecs, épitomes de la sensualité animale et de la séduction machiste. Scott Schuman ne légende pas ses photos. Dans les commentaires, les lectrices espagnoles du blogue nous informent que le gars de gauche est le torero Sebastían Palomo Danko, fils de torero et accessoirement modèle professionnel. S'il vous fait baver, Messieurs, ne rêvez pas, il est en main d'une descendante de la famille Bourbon qui travaille dans la fripe. Remarquez néanmoins qu'il n'a pas revêtu "l'habit de lumière" si spanisch kitsch pour la photo, mais un assortiment de fringues très mode agrémenté de vintage. Pantalon haut de taille, foulard de soie Hermès et ce splendide zahon de cuir qui protège normalement les jambes des picadors à cheval, ici savamment décoré, qu'on retrouve au Mexique sous le nom de chaparrera, les chaps des cow-boys américains.
Coquille pour arts martiaux.

La corrida, c'est l'occasion pour les étrangers de se sentir supérieurs aux Espagnols, -- remarque un commentateur de Madrid qui hait la corrida -- ils peuvent montrer leur sens moral, leur amour des bêtes. Je partage son avis. Puis ils mangent une saucisse de porc sans se demander dans quelles conditions sont élevés ces animaux... Ce qui me révolte plus que la cruauté envers les taureaux, c'est le danger que l'on fait courir aux toreros, ces jeunes hommes qui ne sont même pas protégés par une coquille rigide dans la partie de leur corps la plus exposée aux cornes, comme on peut le vérifier dans la photo du haut.

Hé les gars! je retiens tout de même ceci de la corrida: lors du premier acte, le torero effectue des passes de capote; cette phase lui permet d’évaluer le comportement du taureau. Et c'est après qu'on pose les banderilles...

André

vendredi 3 décembre 2010

Pourquoi je hais le ruban "Stop Sida"

Cela m'est arrivé durant la nuit: je me suis mis à haïr le ruban rouge. Je dansais à la discothèque Mad, la bien nommée, où se tenait une soirée Love & Life, au lendemain de la Journée mondiale de la lutte contre le sida. Déjà, me direz-vous, qu'est-ce qu'une vieille pédale vient faire sur une piste de danse, elle qui devrait ronfler à côté du verre contenant son brise-nouille posé sur la table de nuit? Réponse: merde, j'aime gigoter! Ce trémoussement au milieu de femmes et d'hommes qui pourraient être mes petits-enfants me donne un sentiment -- mi-doux, mi-amer -- d'ancien combattant. Et dans le contexte sida: de survivant. Parce que tout mon entourage amoureux et amical des années 1980 y a passé.

J'étais devant la porte de la disco vers 22h, l'heure indiquée par l'association "des personnes concernées par l'homosexualité" qui nous conviait. [Je ne me sens ni cerné, ni con -- je suis homo.] Les portiers m'ont jeté comme un vieux couillon: 23h. Me suis promené dans la ville en gel. Deux jeunes mecs que j'avais déjà croisés avant m'ont salué au passage, nous avons entamé une conversation. Originaires du Biafra, Nigeria, demandeurs d'asile, l'un occupé à Zurich auprès d'enfants dont il prend soin après l'école. L'autre, cantonné dans un village vaudois, laissé sans aucune occupation à l'âge de 20 ans. Triste pays pourri que le mien qui ne sait pas prendre soin, ni profiter des capacités de gens qu'il nourrit avant de les renvoyer. J'ai évoqué le Biafra des années 1960, où j'avais rendu visite à des amis missionnaires après la guerre, puis suggéré au jeune homme, catholique, de s'adresser à son curé, pour qu'il le mette en rapport avec des indigènes vaudois et anglophones.


Lorsque, dans la disco, a retenti la toccata et fugue BMV 565 de Bach, bientôt engloutie dans le boum-boum de 100 décibel, j'ai compris pourquoi je ne supportais plus le ruban. À la fin des années 1980, il marquait l'engagement des personnes atteintes par le sida, celles qui avaient déjà perdu un proche, celles qui se préparaient à cette mort -- leur propre décès ou celui d'un amant, d'un frère, d'un fils, d'un copain. Le rouge sanglant avait, en quelque sorte, remplacé le ruban noir du deuil. Et il fallait un certain courage pour le porter... Mais là, au Mad, le ruban rouge pendu aux cintres, épinglé aux poitrines, faisait partie de la décoration, comme dehors les boules de Noël. À moi, ça les foutait, les boules. Pour les plus jeunes, c'était le signe heureux que sida n'égale plus mort. Quasiment.

André

mercredi 1 décembre 2010

Dans les dunes de la Grande Canarie

Oeuvre provisoire, exposée à la marée
Colonisée par les Nordiques, Allemands en tête, la Grande Canarie se situe à 28 degrés au-dessus de l'Équateur, au large du Maroc. Sa conquête s'est déroulée comme le blitzkrieg de 1940 en France: les indigènes n'étaient pas suffisamment armés. Mais à la différence des Français, ils sourient aujourd'hui, apprennent les langues; et leurs taxis sont neufs, propres, accueillants. Au volant, ils respectent les passages protégés. À Playa del Inglés, le touriste est roi, même à table puisqu'on lui sert ce qu'il a l'habitude de consommer afin qu'ils ne se languisse point de sa malbouffe habituelle. Il y a des cliniques à tous les coins de rues, entre un pub irlandais et un restaurant viet; elles sont ouvertes 24 heures sur 24, on vous accueille en allemand.

Autre différence majeure d'avec 1940: les indigènes n'ont pas été déportés. Au contraire, on en importe en masse pour faire fonctionner l'industrie touristique. Et personne n'est interné: même les hétéros circulent librement de leur appartement loué à la charcuterie bavaroise, du café Wien à la brasserie norvégienne. Étant donné leur embonpoint stupéfiant, ils ont l'air beaucoup plus nombreux que les gay qui observent leurs moeurs grincheuses avec amusement. Il faut dire que les hétéros sont vieux et s'emmerdent en compagnie d'autres hétéros. C'est pourquoi ils font du shopping, du golf, et s'alcoolisent dès le matin. Lorsqu'ils longent la plage, c'est à marche forcée comme s'ils se rendaient au travail. Devant le buffet gargantuesque de leur hôtel, ils ne se départissent pas de leur gueule de stakhanovistes, tout en empilant des victuailles pour trois jours sur leur assiette dont ils abandonneront le tiers.


Entre Playa del Inglés et Maspalomas, la plage s'étend sur 6 km de sable blond mêlé de sable noir volcanique qui se sépare du blond dès qu'une vague l'étrille. La moitié est attribuée aux baigneurs textile, l'autre aux trop pauvres pour s'en payer. Les promeneurs passent d'un secteur à l'autre sans baisser la culotte ni sourire; les bonnes femmes tirent leur gros cul comme une charrette remplie de boutefas, les bonshommes sont enceints de triplés, voire plus, et ne vont pas les perdre comme la négligente Céline Dion. Ils avancent tel un cortège de fourmis et jamais ne s'écartent de leur piste pour jouer au volley avec les naturistes allemands, splendides dans leur élan, ou s'installer parmi les centaines et centaines d'hommes gay groupés par couples et petites équipes dans le sable, ou affalés sur des transats auteur de la buvette qui porte les couleurs de la corporation.

Derrière la plage: l'immensité des dunes où vagabondent les sportifs et les couples migrateurs qui s'installent sous les cocotiers, derrière les broussailles. De petits perroquets gazouillent dans les branches. On rencontre de vrais lézards, longs et colorés, et aussi de belles triques, mais rarement des serpents.

André

dimanche 28 novembre 2010

Les beaux mecs, le sirocco et l'illumination

Vacances à la Grande Canarie. Une moyenne de 25 degrés; et tous les temps sauf le mauvais. Des jours calmes pour nager dans l'océan; d'autres où les rouleaux défient les nageurs les meilleurs. Et lorsque le sirocco se déchaîne, il ponce les corps nus et recouvre les serviettes de bain qui s'effacent dans l'immensité sablonneuse. Qui va à la chasse derrière les dunes ne retrouve plus sa place.

Le "Coeur est un chasseur solitaire", écrit Carson McCullers en 1940. Tout mec abrite un chasseur au fond de ses tripes. Récit de mes rencontres les plus cools... Tim et moi sommes devenus potes à la vie à la mort parce que j'étais son supporter le plus démonstratif, le soir au bar de l'hôtel, lorsqu'il se lançait dans une chorégraphie à la suite de l'animateur maison. Tim tenait la scène avec l'enthousiasme de la jeunesse, sans crainte du ridicule qui paralyse tant de vieilles personnes. Originaire de Dresde, Tim est un beau mec à l'air déterminé, typiquement saxon. Il a décidé que nous nous reverrons l'an prochain -- même hôtel, même époque. Sans consulter ses parents. Tim a fêté son cinquième anniversaire hier; il a invité quatre copains. Pas de filles. À son âge comme au mien, on pense que les femmes sabotent les fêtes. À moins d'en être amoureux.


Adim, masseur mystique.
Un bon camarade m'a présenté le mystérieux Adim. Ancien adepte de Hare Krishna (no sex), Adim est devenu disciple d'Osho [qui se nommait Rajneesh lorsqu'il était vivant et qu'il collectionnait les Rolls Royce]. J'apprécie la méditation dynamique qu'Osho a popularisée; elle marie le recueillement à la contemplation et au mouvement répétitif qui induisent une transe hypnotique. Durant une méditation dynamique, je ressens cette harmonie sensuelle entre le corporel et le spirituel qui se manifeste aussi dans l'acte d'amour abouti. Le splendide Adim prêche la bonne parole du yoga tantrique, de l'alimentation végétarienne et du massage reiki tout en te chauffant de désir. Comme dit mon camarade, il est à la fois manipulateur et intouchable, flirt et touchant. Alors que nous étions nus sur la plage, épaule contre épaule et que je caressais son dos enduit de filtre solaire, j'ai interrogé Adim: dans quel corps espérait-il renaître, lors de sa prochaine vie? Tout en souriant, comme si c'était une plaisanterie, il m'a rappelé qu'on ne renaît plus lorsqu'on a atteint l'illumination. Ignorant et curieux, je lui ai donc demandé si l'on a encore besoin de se protéger des rayons du soleil lorsqu'on est si proche de la pleine illumination spirituelle.

André

jeudi 25 novembre 2010

Scandale au cours d'anatomie des Beaux-Arts

Thomas Eakins, The Swimming Hole, 1884-1885.
Six hommes se retrouvent pour plonger et nager en toute intimité au bord d'un petit lac ou d'une rivière paisible. C'est l'huile sur toile intitulée The Swimming Hole que Thomas Eakins [cf. billet de vendredi dernier] a peinte entre 1884 et 1885, non pas d'après nature, mais en s'inspirant des photos qu'il a prises lui-même et où posaient des amis et des élèves. Le corps en mouvement est l'un de ses principaux sujets d'étude.

Étude pour The Swimming Hole.
En janvier 1886, lors d'une leçon d'anatomie devant sa classe mixte à l'Académie des Beaux-Arts, alors qu'il parle de l'abdomen, Eakins retire la serviette qui couvre le sexe de son modèle masculin.  Les parents des étudiants protestent énergiquement. Eakins est obligé de démissionner.

Thomas Eakins, Reclining Male Nude, vers 1887.
Trente-huit jeunes hommes parmi ses élèves quittent l'Académie pour le suivre. Ensemble ils fondent la Ligue des étudiants d'art où il peut librement enseigner avec l'aide de modèles nus. C'est dans une ambiance très libre qu'ils s'adonnent à la photographie de la nudité frontale dans un but académique. Je ne sais pas ce qu'en pense Susan Macdowell Eakins, épouse de l'artiste et peintre elle-même.

À Philadelphie, déjà avant le XXe siècle, on enseignait la photographie sous son angle artistique, et non seulement pour collecter des documents!


André

lundi 22 novembre 2010

Un homme prend congé du couillon dépressif qu'il était

Débarquant à San Francisco en 1987, Alexander a décidé de rédiger un journal. "Je me lançais dans un nouveau chapitre de ma vie et je voulais noter mes impressions. [...] J'ai continué jusqu'en 2003, où le diagnostic de cancer a changé le cours de ma vie. D'abord j'ai imaginé que je consignerais chaque étape de la maladie, puis j'ai changé d'avis: c'était trop déprimant." Alexander n'a jamais cru que le cancer le tuerait, mais si cela devait se produire, il ne voulait pas que les dernières pages de son journal soient consacrées aux horreurs de la radiothérapie... Depuis, il n'a plus jamais touché à son journal.


Si ce n'est pour le reformater de WordPerfect à Word for Mac. Je vous passe le détail des difficultés techniques, le découragement... Dans son blogue Voenix Rising, Alexander le survivant mentionne (le 8 novembre 2010) qu'il a jeté son journal à la corbeille. "En relisant les notes, je me suis rendu compte que je ne supportais plus l'auteur. J'avais envie de traverser l'écran, de serrer ce mec de trente berges à la gorge, de le secouer vigoureusement et de lui dire: sors de l'adolescence espèce de trouduc et fonce! [...] À l'époque, je traversais les meilleures années de la vie dans une ville passionnante, mais j'étais profondément misérable sans m'en rendre compte."

Alexander est retourné à Phoenix, Arizona, où il vit maintenant avec "l'amour de sa vie". Le gars qui a émergé à l'autre bout du tunnel -- après le cancer et après San Francisco -- est un homme différent: "En quittant San Francisco, j'étais  exactement le genre de personne que je m'étais juré de ne jamais devenir seize ans plus tôt"... Changer de vie plusieurs fois dans une même existence; bouleverser, renverser, innover, tomber amoureux, retomber, révolutionner, transfigurer: c'est excitant!

André -- Dessin via: Bosgars.

vendredi 19 novembre 2010

Un jeune boxeur nu et musclé face à des bourgeois

Étude. Photo prise dans l'atelier du peintre.
Thomas Eakins: Salutat. La solitude du boxeur.
Tel le gladiateur entrant dans l'arène, le boxeur se présente au public. Rite millénaire. Celui qui va frapper et souffrir ou mourir vous salue! Un petit gars de la classe ouvrière face à des bourgeois qui ont payé pour le voir perdre ou gagner; leur rapport à la violence du pugilat est purement de spectateur. Ils vont connaître une montée d'adrénaline et de testostérone dont leur légitime accueillera les effets plus tard. Ce tableau de l'Américain Thomas Eakins intitulé Salutat date de 1898. Il met en valeur le corps du jeune homme, musclé et vulnérable dans sa nudité, objet de l'admiration du public -- adoration virile, sensuelle, envieuse, sadique -- et masochiste aussi de la part de ceux qui aimeraient connaître le secret de l'endurance: savoir encaisser des coups foudroyants et retourner obstinément au massacre.

Taking the Count. Le comptage. 1898.
Peintre, photographe et sculpteur, Thomas Eakins (1844-1916) était aussi professeur aux Beaux-arts. Ses thèmes: les habitants de Philadelphie, les portraits de connaissances ou de personnalités des arts et sciences. Il a beaucoup photographié ses amis et ses élèves, en particulier pour travailler à la composition de ses tableaux. Il avait quelques jeunes compagnons dans le milieu de la boxe dont il était très proche, je crois. Sa manière de traiter le sujet révèle non seulement sa préférence sexuelle, mais aussi l'homoérotisme souterrain qu'il ressentait dans la société exclusivement masculine réunie autour de sports tels que la lutte, la boxe et la natation. Le thème était tabou à l'époque, il n'était ni nommé ni étudié. Mais des artistes comme Eakins, ou son aîné le poète Walt Whitman, levaient le voile sur ce désir caché pour tenter d'éclairer leurs contemporains.


Ce qu'on peut remarquer aussi chez les boxeurs qu'a peint Eakins: comme lui, ils sont des personnages connus et pourtant fondamentalement solitaires.


André

mardi 16 novembre 2010

Un voyage qui conduit le héros au-delà du coming out

Odyssée dans la ville.
À la suite du suicide de plusieurs adolescents américains harcelés par leurs camarades, le thème de la sortie du placard, du coming out, est revenu plusieurs fois depuis le 2 octobre sur ce blogue. Dans les commentaires, Victor a contribué deux fois au débat (30 oct. et 2 nov., cliquez). Le cas de l'évêque Gene Robinson, un chrétien lumineux dont la vie est en danger, a illustré les risques que certains prennent pour cultiver la vérité. Expliquant sa situation, Victor écrit: "Bien sûr ce n'est jamais le moment quand on sait que la réaction ne sera pas positive... Mais dans l'état actuel des choses, mon coming out n'est pas ma priorité, même si une partie de mon bien-être en dépend." Je respecte Victor pour sa sagesse, sa piété filiale et son partage avec nous. Je mets simplement jamais et quand on sait que en question. On ne sait pas; et jamais ne peut se dire qu'au passé.


Dans les grandes épopées, comme L'Odyssée d'Homère ou Le Seigneur des anneaux de Tolkien; dans les superproductions comme Titanic et Avatar de Cameron, on remarque que les sentiments humains sont universels, les destins aussi, bien qu'ils puissent s'exprimer de différentes manières. Au cours de son aventure (sa vie) le héros affronte des épreuves successives pour obtenir l'objet (connu ou pas encore) de sa quête. Au début, on se demande s'il acceptera le défi qui se présente ou restera dans ses pantoufles, par peur de l'inconnu. Un mentor advient pour l'encourager, lui offrir une épée magique ou lui foutre un puissant coup de pied au cul. Et hop! le héros passe le seuil du non-retour, prêt (mais tremblant) à rencontrer des ennemis et des alliés, à subir des épreuves. Et ainsi de suite jusqu'à ce qu'il affronte l'épreuve suprême et découvre le trésor. Puis il revient dans son milieu d'origine, transformé par ses expériences -- si du moins il y a survécu.
James Bond aussi déprime.


Pour les héros que nous sommes d'emblée, parce que nous avons une différence à assumer qui nous rend plus éveillés -- gay, beur, black, jumeau, trop petit, gros, sourd-muet -- la sortie du placard se présente comme l'une des épreuves à traverser victorieusement. Il y en a d'autres, très importantes aussi, pour nous amener à l'âge d'homme, celui qui donne un sens à l'aventure et nous permet d'en faire profiter notre entourage. Et le voyage continue...


André
Photos: Booty de Richard J. Rothstein via Manhattan Men. Daniel Craig, ci-contre,
dans la série de portraits Crying Men de Sam Taylor-Wood. 

samedi 13 novembre 2010

Modèles académiques de père en fils

L'exposition de "Nus académiques" (1664-1790) qui se tient au Musée des beaux-arts de Bordeaux jusqu'à fin janvier attire notre attention sur les artistes, mais aussi sur leurs modèles et les moeurs de l'époque. Elle présente cent dessins appartenant à la collection de l'École nationale supérieure des beaux-arts de Paris.
En France, l'Académie est un rassemblement de vieux couillons chargés d'empêcher la langue d'évoluer. Ailleurs c'est une société savante, ou pas (Académie de coiffure, de karaté, de billard). Ce qui nous intéresse ici, c'est l'académie exercice de dessin et de peinture, où l'on travaille d'après un modèle nu. Aux 17e et 18e siècles, apprendre à dessiner d'après un être vivant et non seulement des reproductions de statues était une exigence. L'institution n'autorisait que les modèles masculins.

L'École disposait de modèles de conformations physiques et d'âges différents. Ils devaient être endurants pour tenir la pose longtemps, parfois dans des positions très inconfortables et, bien sûr, face à des artistes qui s'en foutaient royalement. Une dose d'exhibitionnisme pouvait soutenir leur moral, mais pas le petit narcissisme de la folle ordinaire. Ceux qui ne supportaient pas la discipline étaient priés d'aller... se rhabiller. On note des cas de charge "héréditaire" comme chez les Gobin où François a succédé à son père après avoir posé avec lui pour Les lutteurs de Nocret, Gobin le jeune étant de face. D'autres doubles académies étaient réalisées à l'économie et l'on reconnaissait le même visage sur les deux personnages.

En haut à g.: Homme debout frappant un taureau, Antoine-Jean Gros (1790). À dr.: Les lutteurs, Jean Nocret (1666). En bas à g.: Homme assis, Jean-Baptiste Isabey (1789). À dr.: Hercule au repos, François-Guillaume Ménageot.
 
André